La fin du dollar américain (USD), une nouvelle ère en or ?
Le dollar américain a longtemps été considéré comme mètre-étalon, comme la monnaie acceptée par presque tous les acteurs du commerce international. Néanmoins, une communauté de plus en plus grande, envisage un avenir sans dollar. C’est le cas notamment du célèbre investisseur Jim Rogers, ancien partenaire d’affaires de l’Homme qui a fait sauter la Banque d’Angleterre, Georges Soros. Il annonçait récemment, comme de plus en plus d’observateurs sur les marchés, que le temps de l’USD en tant que monnaie internationale dominante serait sans doute bientôt du passé. Qu’en est-il réellement ?
Le dollar, monnaie mondiale de référence
En 1944, les Accords de Bretton Woods furent signés par 44 pays, marquant le début du règne des États-Unis sur la sphère monétaire internationale en faisant du dollar américain la seule monnaie convertible en or.
Le système de Bretton Woods attribua au dollar une valeur « as good as gold » (aussi solide que l’or). En effet, il établit le dollar comme l’étalon-or. Seul le dollar pouvait être échangé en or, tandis que toutes les autres monnaies étaient convertibles en dollar. Cette mesure donna ainsi au dollar le statut de monnaie de réserve pour les banques centrales. Cette suprématie du dollar reflétait sa stabilité et la confiance accordée par les banques centrales. Le fameux « as good as gold ».
Les États-Unis détenaient alors les plus grandes réserves en or. Résultant en partie des paiements effectués par les Alliés pour s’approvisionner en or pendant la Première Guerre mondiale. Ce qui propulsa les États-Unis au rang de plus grand détenteur d’or. À la suite de la guerre, de nombreux pays ont choisi de lier leur monnaie au dollar américain. Mettant ainsi fin au système de l’étalon-or.
Un effondrement en cours
Dans une interview accordée à Sputnik, Jim Rogers a estimé que le temps du dollar américain était proche de la fin. De plus en plus de pays cherchant ainsi des alternatives à la monnaie internationale actuelle.
« De nombreux amis de l’Amérique sont en train de bouger, d’essayer de trouver quelque chose pour concurrencer et finalement remplacer le dollar américain. Cela arrivera. Cela s’est toujours produit », a-t-il déclaré, ajoutant que selon lui, « le temps du dollar américain touche à sa fin ».
Quelles sont les raisons de ce changement de cap de l’USD ? Beaucoup de spécialistes et analystes estiment que les échanges sur le changement du système actuel basé sur le dollar sont revenus sur le devant de la scène avec les spéculations autour du relèvement de la dette des Etats-Unis.
En effet, aujourd’hui les USA sont le pays le plus endetté de l’histoire. Le montant de la dette à la fin de l’année 2022 était exactement de 31.419.689.421.557 dollars et 90 cents. Soit plus de 32 billions de dollars. Les États-Unis sont ainsi en tête du classement mondial. Cela ne vaut pas seulement en chiffres absolus pour l’ensemble du pays, mais aussi par habitant. En comparaison, la dette publique française a atteint 3 013,4 milliards d’euros le 31 mars 2023 selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).
Si la confiance dans l’USD n’est pas ébranlée, la confiance dans les Etats-Unis, elle, et notamment au risque de défaut de paiement du pays, sont bien d’actualité pour bon nombre de parties prenantes. La seconde raison est que la monnaie internationale a pour caractéristique d’être totalement neutre. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, les Etats-Unis utilisent même leur dollar comme une arme de sanctions.
Le dernier cas d’utilisation de cette arme monétaire a été le gel des comptes en dollars de la banque centrale russe depuis son conflit avec l’Ukraine. Mais aussi l’expulsion de la Russie du système de paiement international SWIFT. Logiquement, la cascade des parties prenantes touchées par ces sanctions va plus loin que la Russie. Les partenaires commerciaux des pays sanctionnés craignent que les sanctions infligées par les USA ne se poursuivent et qu’ils soient eux aussi touchés indirectement par ces sanctions. Par conséquent, les pays touchés, menacés par l’arme que devient le dollar, font désormais tout pour l’éviter.
Qui sont les détracteurs du dollar américain ?
On l’a déjà évoqué, les pays sanctionnés ou menacés sont les premiers à chercher une alternative au dollar. La Russie par exemple, traite déjà ses affaires avec ses partenaires commerciaux dans leurs propres monnaies nationales. Mais la coalition contre le dollar, n’est pas uniquement par des pays de manière individualisée. Les BRICS par exemple mènent eux aussi la danse face au dollar. Les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) travaillent actuellement sur une nouvelle monnaie unique.
À la tête de ce mouvement, l’alliance russo-chinoise souhaite mettre en place une monnaie unique, internationale, liée à l’or. La raison est toute simple. Ces deux pays sont aujourd’hui les deux plus grands producteurs d’or dans le monde. Et profiteraient ainsi pleinement de cette nouvelle monnaie et cela permettrait en plus, de faire chuter le dollar rapidement. Une annonce sur cette potentielle monnaie est attendue lors du sommet des BRICS des 22, 23 et 24 août prochains.
D’ailleurs, les BRICS anticipaient déjà cette indépendance face au dollar et aux Etats-Unis, en créant en 2014, leur propre banque / fonds international. La NDB (New Development Bank) pour concurrencer et s’émanciper face à la banque mondiale et au FMI (Fonds Monétaire International).
Mais les BRICS ne sont pas les seuls. Ils sont aujourd’hui les plus puissants car représentent à eux seuls plus de 41% de la population mondiale. Mais certains pays d’Asie suivent aussi la tendance. 10 pays d’Asie du Sud-Est ont récemment encouragé l’utilisation de monnaies nationales afin de réduire leur dépendance face au dollar américain et d’autres systèmes financiers occidentaux.
Un effondrement confirmé côté graphique ?
Rien de moins sûr que de dire aujourd’hui que le dollar est en baisse depuis un certain temps déjà. Néanmoins, selon certains analystes, cette chute est peu significative pour le grand public. Car les autres monnaies de référence comme la Livre Sterling et l’Euro connaissent elles aussi une baisse de valeur similaire.
La seule manière de confirmer cette chute du dollar serait de la mesurer par rapport au prix de l’or mesuré en dollar. Mais le prix de l’or est manipulé par le marché de l’or papier. Selon Jim Rickards, avocat américain spécialiste de la question des affaires financières, il affirme, en s’appuyant sur un statisticien reconnu d’un fonds spéculatif, que des preuves de cette manipulation existent. Selon eux, après avoir étudié les cours d’ouverture et de clôture du marché primaire de l’or, le Comex. Il souligne même qu’il s’agirait du « cas de manipulation le plus flagrant qu’il ait jamais vu ».
Cette affirmation est soutenue par le professeur Rosa Abrantes-Metz de la New York University Stern School of Business. Elle est l’une des plus grandes expertes mondiales en matière de manipulation des cours et un expert agréé auprès des tribunaux, s’appuyant ainsi sur un rapport amenant à la même conclusion.
Quid de l’efficacité de la monnaie BRICS ?
Après avoir démontré un risque de manipulation fort, le même Jim Rickards indique que la potentielle monnaie BRICS ne pourrait faire face au dollar. Pensant ainsi que cette monnaie ne serait pas indexée au cours de l’or mais à un poids déterminé, une once d’or par exemple.
La Russie et la Chine auraient donc tout intérêt à faire augmenter la valeur de l’or en dollars. Du fait de leur production, mais aussi en en achetant physiquement sur le marché. Ces pays pourraient être les grands vainqueurs de ce changement de mètre-étalon mondial.
Cependant, il est essentiel de rappeler que le dollar américain possède toujours des caractéristiques uniques. Telles que la profondeur des marchés financiers américains et la confiance qu’il inspire en tant que monnaie de réserve. Ce qui continue de le maintenir au centre du système monétaire international. Tout changement significatif dans l’hégémonie du dollar prendrait du temps et serait le résultat de développements économiques, géopolitiques et monétaires complexes à l’échelle mondiale.