L’Arabie Saoudite constitue-t-elle une opportunité ?
Les rois du pétrole, ce sont eux. Mais les pactoles ne viennent pas seuls, et une bonne étoile n’est pas bien utile lorsque le ciel est chargé de nuages. Vous comprenez où on veut en venir ? Nous non plus. Pour plus de clarté, plongeons nous dans l’histoire (économique) de l’Arabie Saoudite…
L’Arabie Saoudite et l’or noir, un défi entre prospérité et écologie
Elle débute officiellement après 31 ans de guerre, quand les provinces du Nejd et du Hedjaz fusionnent le 22 septembre 1932 et sont placées sous l’autorité du roi Ibn Saoud. Six années plus tard, l’or noir est découvert et marque le début d’un intérêt de Washington pour Riyad, se concrétisant par une alliance stratégique formalisée au travers du Pacte du Quincy. Néanmoins, les champs de pétrole ne sont pas une exception saoudienne et fleurissent dans la région du Moyen-Orient. Ainsi, en 1960 naît l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) sous l’égide de cinq pays, dont l’Arabie Saoudite. Cette organisation permet de contrôler la distribution de pétrole tout en régulant son prix.
Toutefois, en 1973, alors que l’Arabie Saoudite est le pays le plus influent au sein de cette organisation et dans l’actualité brûlante de la guerre du Kippour, le ministre du Pétrole et des Ressources minières orchestre un quadruplement des prix de l’actuel baril de Brent et constitue immédiatement un magot sur lequel va s’appuyer la puissance en devenir que le pays incarne. Les entrées financières issues de la manne pétrolière ont ainsi permis une modernisation économique de la nation. Le plan «Vision 2030» porté en 2016 par le roi Salmane représente cette résolution profonde de se tourner vers l’avenir, tout comme le projet immobilier futuriste de 34 km2 «The Line». Cette dernière création est le symbole d’une volonté forte de Riyad de s’ancrer dans la modernité, incluant en son sein progrès technologiques, urbanistiques, techniques et industriels. Le grand oublié de ce chantier pharaonique, et pas des moindres, est l’environnement. Les gigantesques murs éburnéens et miroitants ne suffisent pas à occulter le balayement du revers de la main de l’enjeu écologique, souvent relégué au second plan par le royaume.
L’économie saoudienne : Une puissance pétrolière face aux aléas du marché
Ce panorama historique nous permet de cristalliser une partie de la dynamique économique en œuvre : une économie de rente qui ne veut pas louper le coche de la modernisation. Mais, pour mieux comprendre le paysage économique de la 17e puissance mondiale en 2023 au regard du critère du Produit Intérieur Brut (PIB), il convient de parler chiffres.
Depuis le début des années 2010, la croissance du PIB a été globalement positive, mise à part l’année de pandémie de Covid-19. Les millésimes 2021 et 2022 ont marqué une reprise sur les chapeaux de roues avec respectivement +5,08% et +7,49% de croissance sur les deux années. Néanmoins, on assiste à un recul de la richesse globale de la pétromonarchie en 2023 avec -0,75% de PIB, ce qui fait de la performance du pays la plus mauvaise des membres du G20, si l’on élimine l’Argentine. En cause, les fluctuations constantes du prix du baril, oscillant entre $71,28 USD et $97,74 USD, alors que le pays est hautement dépendant du pétrole en matière de croissance économique.
L’inflation de l’Arabite Saoudite
Côté inflation, la tendance est à la baisse avec une valeur de 5,34% en 2010 contre 2,47% en 2022. Et la pression inflationniste n’a pas inquiété Riyad en 2023, le taux s’établissant à 2,33% sur un rythme annuel, avec la hausse des prix de l’alimentaire tirant légèrement le temps vers le haut.
Cette tendance pérenne est positive pour la monnaie nationale, le riyad saoudien, dont le taux de change avec le dollar américain fluctue relativement tout en restant dans un couloir compris entre 0,264 USD et 0,271 USD depuis 2019.
Tadawul, la Bourse de Riyad, a joué un rôle fondamental dans cette dynamique économique, ayant attiré l’œil des investisseurs du monde entier avec des introductions en bourse significatives. En outre, son indice Tadawul All Share a augmenté de plus de 50% au cours des cinq dernières années.
Ainsi, les indicateurs macroéconomiques et la plus grande place boursière nationale ne sont pas alarmants, témoignant même qu’une certaine stabilité économique et financière dans le pays des magnats du pétrole.
Toutefois, peut-on réellement réduire le pays à son “petit” tas d’or noir ?
Il est évident qu’en tant que premier producteur mondial de pétrole par le biais de sa société Saudi Aramco, l’Arabie Saoudite repose sur cette richesse énergétique, alors que 90% des actions de la société précitée sont possédées par le gouvernement. Les dividendes perçus servent à la fois à rembourser le déficit public ainsi qu’au financement des investissements publics.
Parce que le pays souhaite s’émanciper du pétrole. Cette réduction de sa dépendance est en train de s’opérer via le plan «Vision 2030». Pour diversifier son économie, la nation compte sur le tourisme, le football, le renouvelable ou encore le pétrochimique comme le montre SABIC, acteur majeur dans ce secteur. Dans le secteur financier, Al Rajhi Bank, banque islamique de premier plan, a connu une croissance significative, reflétée par une augmentation de ses actifs de 12% au cours des cinq dernières années. Un dernier exemple qui ne clôt pas la longue liste : la Saudi Telecom Company (STC), image de la technologie comme secteur d’avenir pris en compte par l’Arabie Saoudite.
La situation économique, financière et commerciale est donc favorable au pays, mais ne doit en aucun cas occulter la situation sociale, politique et les conséquences environnementales délétères de l’activité pétrolière saoudienne. L’Arabie Saoudite doit encore progresser socialement et juridiquement pour permettre d’instaurer un environnement sécuritaire pour les femmes et les minorités tout en réduisant les inégalités. En outre, elle doit accélérer sa transition écologique.
A l’aune de tous ces éléments, comment s’intéresser financièrement à l’Arabie Saoudite ?
D’une part, il existe un Exchange-Traded Fund (ETF) offrant une exposition aux grandes et moyennes capitalisations saoudiennes. Ce dernier est l’iShares MSCI Saudi Arabia ETF, ou KSA, émis par la société de gestion BlackRock et situé autour des 41,60 USD à l’heure où nous écrivons cet article. C’est un moyen à la fois d’investir dans l’économie saoudienne par un indice composé d’actions saoudiennes ou simplement de suivre la perception des investisseurs étrangers de cette économie en marche pour dépasser sa pétro-dépendance. Pour confirmer cette dynamique, un nouvel ETF a été émis fin novembre 2023 à Hong-Kong, le CSOP Saudi Arabia ETF, alors que les liens entre la Chine et l’Arabie Saoudite se resserrent.
D’autre part, un site internet exhaustif (Invest Saudi) répertorie l’ensemble des opportunités d’investissement existantes en Arabie Saoudite, facilitant l’entrée d’IDE, déjà importants à ce jour avec un stock d’IDE à 269 milliards de dollars américains en 2022.
Conclusion
De manière générale, le gouvernement multiplie les opérations séduction pour attirer toujours plus d’investisseurs étrangers, tendance continue et dont on ne voit, pour le moment, pas le bout. Ainsi, pour revenir à nos élucubrations du début, l’horizon n’est pas encore tout à fait clair pour Riyad, l’ombre des questions sociales et environnementales planant, mais la solidité économique apporte une base solide à une nation en pleine expansion, notamment au sein des BRICS+, ces nations en contrepoids des pays développés à économie de marché.