Wall Street est-il le film le plus réaliste sur la finance ?
Le film Wall Street sorti en 1987 est toujours un classique aujourd’hui. Il a connu un succès retentissant, aussi bien pour la qualité du jeu de ses acteurs que pour la fidélité avec laquelle il retranscrit l’univers des marchés financiers.
Peu de films dédiés au monde de la finance ont autant frappé l’imaginaire collectif, ont autant fait l’unanimité auprès du public, des critiques et des professionnels que Wall Street. Ce film, sorti en 1987 et réalisé par l’Américain Oliver Stone, a fait forte impression à ses débuts. Devenant très vite culte de par le regard qu’il apporte sur les enjeux financiers, il a consacré la légende d’Hollywood Michael Douglas, qui remporta le Golden Globe et l’Oscar du meilleur acteur en 1988.
Mais de quoi parle le film Wall Street ?
Dans ce long métrage de deux heures, le spectateur suit l’histoire et le parcours de Bud Fox, un jeune homme, fils d’un modeste technicien d’aviation, qui travaille en tant que courtier chez Jackson Steinem, une maison de titres de Manhattan. Passant outre les réticences de son père vis-à-vis de Wall Street, il aspire à devenir riche et rêve de travailler pour Gordon Gekko (dit « Le Grand »), l’un des traders les plus agressifs de la place. Sous la direction de ce dernier, il s’initie à la spéculation.
Wall Street, dès sa sortie, a fait office de précurseur. En effet, le film décrit une réalité de l’époque, celle de la spéculation et du profit à tout prix. Les marchés financiers servent autant d’enjeu que de décor pour une histoire de relation père-fils / mentor-élève / ami-ennemi fascinante. Mais ce qui le rend unique, même encore aujourd’hui, c’est bien la très grande qualité avec laquelle le réalisateur dépeint l’univers de la finance des années 1980.
Wall Street, un film qui colle à la réalité
En effet, l’œuvre fourmille de détails. Dans un article intitulé « Le substrat professionnel dans Wall Street, le film d’Oliver Stone », Michel Van der Yeught, professeur d’anglais d’économie et de finance mais aussi spécialiste de l’Histoire de la Bourse New York, l’affirme. « Le plus grand mérite de l’œuvre réside cependant dans le brio et la vraisemblance avec lesquels elle entrelace la logique du récit et celle des marchés financiers. […] On ne peut qu’admirer la quantité et la qualité des éléments réalistes qui enracinent l’intrigue dans un monde professionnel, certes typifié, mais très authentique. »
Parmi ces éléments, le décor est très soigné. Nous parlons des lieux, des environnements dans lesquels se déroule l’intrigue. La salle des marchés de la maison de titres de Bud présente des éléments techniques caractéristiques des marchés des valeurs : terminal de cotation, télescripteur électronique etc. Le quotidien du trader est également bien retranscrit. Les traders appellent leurs clients en pratiquant « l’appel à froid » (sans rendez-vous) afin de leur proposer des actions ou des obligations à acheter. On voit ainsi Bud répéter inlassablement les mêmes phrases commerciales destinées à convaincre ses clients (comme un certain Jordan Belfort dans Le Loup de Wall Street). Le parquet du NYSE, le vrai nom de Wall Street, est aussi très réaliste. Le spectateur a l’occasion d’y observer les acteurs et le fonctionnement du marché. La cloche ouvre et ferme les séances. Les courtiers reçoivent leurs ordres de vente ou d’achat de l’extérieur, par exemple de la part de Bud chez Jackson Steinem, et viennent les faire exécuter à des postes de négociation répartis sur le parquet. Chacun d’entre eux est réservé à un secteur du marché (automobile, pétrole, industrie lourde, informatique, banque, etc.).
Oliver Stone, le trader réalisateur
Wall Street présente également une représentation fidèle de la hiérarchie boursière. Au bas de l’échelle professionnelle se trouvent les coursiers qui transmettent aux opérateurs les messages et les ordres d’opération. Au-dessus d’eux opèrent les courtiers, payés à la commission, qui servent d’intermédiaires entre les clients et le marché. Encore au-dessus se trouvent les traders qui opèrent pour leur propre compte. Ils prennent plus de risques que les courtiers et jouissent donc d’un plus grand prestige. Au niveau supérieur enfin, dominent les banquiers d’affaires qui financent les offres publiques de vente, les fusions, les acquisitions, les OPA etc. On ne les voit pas dans le film, même s’ils sont mentionnés sous des noms imaginaires (Kahn Seidelman) ou réels (Morgan).
La liste des éléments réalistes pourrait être encore longue : matériel Quatron présent partout, enchères, démonstrations diverses d’achats ou de ventes, OPA hostiles etc. Il faut vraiment fouiller pour trouver des incohérences. La plus grande est un anachronisme: au début du film, le personnage de Marvin évoque l’accident de la navette Challenger qui a eu lieu en 1986. Or le film est censé se dérouler en 1985, un an avant cet événement.
Mais alors quel est le secret de Oliver Stone ? Et bien, son savoir lui vient de son père, qui était un ancien trader. Il a ainsi réalisé son film en hommage à « Louis Stone, stockbroker, 1910-1985 », courtier à Wall Street, comme le rappelle même le générique. Voilà qui explique son extrême souci du détail. L’Américain n’a donc eu aucun mal à puiser dans la mythologie de la Bourse de New York pour densifier son récit et le rendre crédible. Inspiré par les nombreuses OPA des années 1980, Oliver Stone a mis l’accent sur les prédateurs (ou raiders). Les personnages de Gordon Gekko et de Sir Lawrence Wildman, les deux exemples concurrents du film, ont été calqués respectivement sur l’Américain Ivan Boesky et le Britannique Sir James Goldsmith, qui ont bel et bien existé.
Un premier volet du film Wall Street bien mieux réalisé que le second
Plus généralement, le film de 1987 est bien mieux considéré que sa suite : Wall Street, l’argent ne dort jamais, sortie en 2008. Certes, en termes d’ambiance, le métrage frappe encore juste. Mais il se laisse malheureusement beaucoup plus aller à la caricature. La façon de réfléchir de Bretton James, le patron de la banque Churchill Schwartz par exemple, a étonné les professionnels habitués à la rigueur d’Oliver Stone. Il se comporte plus comme un gérant de fonds spéculatif que comme un patron de banque d’investissement. On a du mal à y croire.
Les traders et courtiers, eux, n’apprécient vraiment pas cette deuxième partie du diptyque. Selon un sondage proposé par EFC en janvier 2017, 60 % jugeaient le premier volet « réaliste», contre à peine 15 % pour le second. L’auteur de l’étude s’est d’ailleurs fendu de ce commentaire : « En fin de compte, qu’avons-nous appris ? Tout d’abord, que tout le monde ou presque à Wall Street déteste le film Wall Street II, Money Never Sleeps. »
Mais tout n’est pas à jeter dans la suite du film de 1987. Le réalisateur a voulu recréer l’ambiance dramatique des premiers mois de la crise de 2008 et il y parvient avec brio. La faillite de la maison Keller Zabel est notamment inspirée de celle de Bear Stearns.
Que ce soit Wall Street ou sa suite L’argent ne dort jamais, les deux œuvres de Oliver Stone ont marqué l’histoire du cinéma. Même si elles n’ont pas toutes les mêmes qualités ou les mêmes défauts, elles font partie des films qui retranscrivent le mieux l’environnement et les enjeux des marchés financiers. Elles sont à voir, aussi bien pour les néophytes que pour les professionnels de la finance.
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